novembre 17, 2008 à 12:45 · Classé sous Cooptation - réseaux sociaux ·Taggé facebook, génération Y, Recrutement, second life, speed-recruiting
Ci-après une interview parue il y a quelques semaines dans Entreprise et Carrières (n° 919, 9 au 15 septembre 2008).
L’entretien avec…
Yannick Fondeur, économiste au Centre d’études de l’emploi*
Réseaux sociaux, univers virtuels, blogs d’entreprise, speed recruiting…
Les entreprises en font-elles trop avec la génération « Y » ?
Le concept de “génération Y”, qui fait habituellement référence aux individus nés entre la fin des années 70 et le milieu des années 90, n’est pas le produit de travaux sociologiques. Il a été introduit dans le jargon du marketing et du management en référence à celui de “génération X”, qui désigne la génération immédiatement postérieure à celle du baby-boom, souvent décrite comme manquant d’identité propre (d’où le qualificatif “X”). Les consultants sont friands de ce type de concepts globalisants. Les chercheurs en sciences sociales un peu moins : leur pouvoir explicatif réel est généralement assez limité.
Ces méthodes sont-elles devenues vraiment indispensables pour recruter ?
Dans le contexte d’un marché du travail marqué par le départ à la retraite des “baby-boomers”, cette “génération Y” - bien moins nombreuse - qui entre progressivement en activité, est naturellement l’objet de toutes les attentions de la part des recruteurs. Et les consultants vendent l’idée que ceux qui la comprendront le mieux, grâce à leurs conseils, seront à même de d’attirer et de valoriser ses “talents”. D’où la mobilisation d’outils de recrutement censés correspondre à cette cible : utilisation de Facebook, salons virtuels sur Second Life, “speed-recruiting”… En réalité, il s’agit la plupart du temps de simples opérations de communication prenant appui sur l’écho médiatique inévitablement suscité par ce type de “curiosités”.
Non seulement ces méthodes ne sont pas indispensables pour recruter les jeunes générations qui se présentent actuellement sur le marché du travail, mais elles peuvent aussi avoir un certain nombre d’effets pervers. On peut citer l’exemple de la récente opération de “speed-recruiting” d’Accenture, qui reposait sur le concept d’une soirée recrutement, baptisée “one night one job”, dont la fréquentation était assurée par la possibilité de se voir remettre à l’issue de la soirée un gadget technologique et/ou un contrat de travail. Or il s’avère qu’au bout de quelques semaines que 30 à 40 salariés ainsi embauchés ont vu leur période d’essai rompue. Sans revenir sur les raisons de ces ruptures, qui font l’objet d’une polémique, on perçoit là clairement les limites d’opérations où le processus de recrutement se dissout dans la dimension communication.
Quel type de profil est visé ?
Au sein de la “génération Y”, ce sont clairement les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur qui sont visés par ce type de méthodes. L’intérêt pour Facebook est de ce point tout à fait significatif : de par son origine (réseau interne pour les étudiants d’Harvard, élargi ensuite à l’ensemble des titulaires d’une adresse mail .edu, avant d’être ouvert à tous), ce réseau social numérique rassemble d’abord des étudiants et de jeunes professionnels diplômés de l’enseignement supérieur. Et c’est en cela qu’il intéresse les recruteurs, bien plus que Myspace qui compte davantage d’individus de la “génération Y” mais présente l’inconvénient d’être moins “élitiste”.
Quelles sont les limites?
Les médias de recrutement mobilisés pour atteindre la “génération Y” reposent souvent sur un brouillage entre sphère privée et sphère professionnelle et/ou entre loisir et travail. Il est loin d’être évident, d’une part, que les candidats apprécient ce mélange des genres et, d’autre part, que cela débouche sur des recrutements efficients. Ce qu’un candidat recherche c’est l’information la plus complète sur les postes à pourvoir et sur les modalités de sélection. Qu’elle que soit sa génération.
* auteur de «Internet, recrutement, et recherche d’emploi» (Documentation française, 2006, n°52)
Propos recueillis par Anne Bariet
lundi 1 décembre 2008
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